Les sourdines.
Les différentes sourdines.
La trompette offre la possibilité d'obtenir des sons variés en
utilisant les diverses sourdines, accessoires que l'on place sur ou dans le
pavillon. Les principaux types sont décrits ci-dessous, mais il existe
bien d'autres types ou modèles de sourdine produisant des effets variés,
selon la forme de la cavité, l'emplacement des évents, la jonction
au pavillon, voire la présence de membranes vibrant comme un mirliton
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La sourdine sèche (en anglais "straight mute"),
est la plus utilisée dans tous les genres de musique. En musique
classique, si le type de sourdine n'est pas mentionné, c'est celle
qu'on doit utiliser. On en trouve en métal, en fibres ou en plastique,
de forme droite ou évasée. |
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Certaines partie de trompette, par exemple dans "Un américain à Paris" de Gershwin, ne vous laissent que quelques secondes pour mettre ou enlever la sourdine. Il est alors utile d'avoir un support fixé au pupitre pour éviter de la chercher ou poser par terre. |
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La sourdine "wa-wa" offre une variété
de sons selon la position du tube coulissant : |
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La sourdine bol ("cup mute") produit un son
particulièrement doux. La fixation du bol doit permettre de régler
la distance du bord du bol au pavillon de la trompette, qui doit être
d'environ un centimètre. Souvent, cette sourdine est prévue
pour être aussi utilisée comme sourdine sèche en enlevant
le bol, mais la qualité (justesse et sonorité) est généralement
inférieure à celle d'une vraie sourdine sèche. |
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La "plunger", utilisé dans le jazz
dixieland, était à l'origine une ventouse en caoutchouc
de plombier destinée à déboucher les éviers.
Comme la sourdine wa-wa, on la déplace en jouant pour alterner
les sons ouverts (notés "o" sur la partition) et bouchés
(notés "+" sur la partition). On l'utilise aussi quelquefois
associée à la sourdine sèche pour des effets "jungle"
à la Bubber Miley (cornettiste de l'orchestre de Duke Ellington
dans les années 20). |
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La "bucket mute" (en haut) et la "velvet mute" (en
bas) s'utilisent en big band pour atténuer la brillance du son de
la trompette (résultant de l'utilisation d'embouchures très
relevées à queue étroite) pour certains passages musicaux,
ou comme succédané de bugle pour les trompettistes qui n'en
ont pas. |
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La sourdine Solotone ou Cleartone est une sorte d'hybride entre la sourdine sèche et la sourdine harmon. Cette sourdine était souvent utilisée dans les orchestres swing des années 1930-1940 et on trouve encore des arrangements qui la demandent. Le son est voisin de celui d'une wa-wa ouverte (sans mettre la main devant). |
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La sourdine muette ou sourdine d'appartement (appelée
en anglais
"silent mute", "whisper mute" ou "practice mute")
est très utile pour travailler son instrument à toute heure
chez soi ou dans une chambre d'hôtel. La trompette est ainsi l'instrument
qui produit le moins de gène pour le voisinage, contrairement à
une opinion répandue. C'est un cône rempli de matériau
absorbant ou de chicanes pour amortir le son, avec des orifices de décompression
pour laisser sortir l'air, mais qui obture hermétiquement le pavillon.
Une bonne sourdine d'appartement doit perturber le moins possible l'émission
du son et maintenir la sensation d'ouverture de l'instrument, tout en
réduisant
au maximum le niveau sonore. |
![]() Enfin,
il faut mentionner pour mémoire le système de sourdine
incorporée à l'instrument du cornet "à écho" dans lequel
un quatrième piston dévie la colonne d'air vers un second pavillon de
forme quasi fermée. Ce dispositif ingénieux permet de passer instantanément
du son ouvert au son bouché. On a même construit des trompettes
à écho sur le même principe. A droite, un rare Besson Sovereign 928 à écho datant de 1990 environ. |
Principe de fonctionnement.
Les sourdines (à l'exception des "plunger" et "velvet")
modifient la forme de la colonne d'air au niveau du pavillon, là où
se forme le son de l'instrument. En réduisant l'ouverture à l'air
libre, la sourdine réduit la transmission d'énergie à l'air
ambiant et renvoie donc une plus grande proportion de cette énergie
vers l'embouchure. La courbe d'impédance est donc profondément
modifiée,
en nette augmentation surtout dans les aigus (rappelons que l'impédance
d'entrée de l'instrument est directement liée à la proportion
d'énergie acoustique réfléchie et non transmise par
le pavillon). Inversement, les résonances dans le registre grave
sont généralement
atténuées et déplacées en fréquence (vers
le haut). Une sourdine donne donc souvent plus de facilité dans les
aigus, et c'est pourquoi certains musiciens de jazz l'utilisent presque systématiquement.
On a vu à la page sur le son que
le pavillon favorise les harmoniques élevées
qui donnent
le son typique des cuivres. Quand on met une sourdine dans
le pavillon, on réduit l'efficacité du rayonnement pour la
plupart des fréquences.
Cependant, il y a habituellement une bande des fréquences que la sourdine
transmet bien, provoquant ce qu'on appelle un "formant" dans le son émis,
c'est à dire une large bande de fréquences renforcées.
Ainsi, la sourdine sèche produit
des formants à diverses fréquences dans la
gamme de 1 à 3 kHz. La voix humaine a également des formants
dans cette gamme de fréquences, et on les
détecte facilement parce que c'est ainsi que nous identifions la parole.
La sourdine rend le son plus doux, mais elle change aussi, au sens propre,
la voix de l'instrument. En effet, quand on passe d'une voyelle à l'autre
dans la parole, par exemple de ooo à aaa, on change de formant. Quand
on bouge la main devant l'extrémité d'une sourdine ouverte, on
change la fréquence du formant de l'instrument ; ainsi déplacer
la main devant la sourdine peut donner un son qui ressemble à ooo-aaa,
ooo-aaa, ce qui est probablement l'origine du nom "wa-wa". Un exemple frappant est donné par le cornettiste Rex Stewart dans "Boy meets horn" enregistré avec l'orchestre de Duke Ellington en 1943.
Tout objet qui masque une fraction substantielle du pavillon
agira en tant que sourdine. La véritable difficulté en
concevant une sourdine est d'arranger les réflexions au pavillon de
sorte que l'accord soit peu affecté.
La conception des sourdines est totalement empirique, mais une étude
de leur effet
sur le son de la trompette a été publiée en anglais
par Matthias Bertsch en 1995 (document au format PDF de 545Ko).