Recherches.
  Cet article passe en revue les recherches entreprises (dont une partie 
    jusqu'à présent non publiée) pour déterminer l'influence
    des matériaux
    sur les propriétés musicales des cuivres. La
    plupart des travaux portent sur les propriétés vibratoires
    des pavillons de trombone (choisis pour leur grande surface
    vibratoire libre) et dans plusieurs cas, le même ensemble de pavillons
    expérimentaux
    a subi une série de différents essais. 
  Plusieurs paramètres  peuvent être appropriés
  aux études de vibration de pavillon,  incluant
  :
  a) Épaisseur de paroi 
  b) Matériau (composition chimique) 
  c) Positions des entretoises de fixation
  d) Diamètre du bord 
  e) Finition (par exemple argenté ou verni) 
  f) Méthode de fabrication (d'une seule pièce / avec une seule soudure
  / martelé à la main) 
  Il est raisonnable de supposer que si le matériau est épais,
  l'effet de la plupart des autres paramètres sera négligeable.
  Par conséquent les travaux récents  tendent à se concentrer
  sur l'effet d'une variation de l'épaisseur de paroi. La présentation
  de pavillons d'épaisseurs différentes aux instrumentistes
  soulève deux autres problèmes qui sont souvent négligés
par les expérimentateurs :
1. Poids et équilibre. Les instrumentistes
sont étonnamment
  sensibles à la variation de poids et d'équilibre provoquée
  par un petit changement d'épaisseur du pavillon. Dans
  les expériences réalisées par Smith {3}, tous les pavillons
  interchangeable de diverses épaisseurs avaient leur propre compensateur
  pour avoir des poids et des centres de gravité identiques. Dans de telles
  conditions les instrumentistes ne pouvaient pas détecter des différences
  dues au poids ou à l'équilibre. Sans cette compensation les instruments
  ont été aisément identifiés.
  2. Formes 
  de perce identiques. Blaikley {4}, se référant à ses
  expériences
  avec des pavillons en papier et en métal {5}, déclare
  que " le matériau a peu d'influence  par rapport à la
  forme." Backus
  {6}, par exemple, se rendait également bien compte de l'importance d'utiliser
  des pavillons de profil de perce identique  pour comparer les
  matériaux. Toutefois, d'autres rapports d'expériences ne donnent
  pas au lecteur la garantie que les perces étaient identiques. L'expérience
  de l'auteur (et d'autres concepteurs) suggère que les pavillons
  (et autre  parties étirées et tournées) d'épaisseurs
  de paroi différentes ne conservent pas les mêmes dimensions
  internes une fois enlevés de la forme ou du mandrin. Les mesures sur
  des pavillons de trompette, par exemple, montrent une augmentation
  de 0,15 millimètre
  de diamètre pour les pavillons minces (parois de 0,3
  millimètre) par rapport aux pavillons épais
  (parois de 0,6 millimètre). Cette variation peut avoir un effet significatif
  sur les caractéristiques 
  musicales de l'instrument, et explique en partie pourquoi les fabricants échouent
  souvent à copier les instruments  de leurs concurrents. En outre, les
  matériaux
  des différents constituants vont renforcer cette erreur.
  
  Propriétés
  vibratoires des pavillons des cuivres.
  Il n'y a aucun doute qu'un instrumentiste peut sentir son instrument vibrer
    dans ses mains en plus de l'interaction dynamique avec ses lèvres,
    et il a donc de bonnes raisons de supposer que le matériau contribue à la
    qualité musicale de son instrument. 
  Les vibrations des parois peuvent interagir avec l'onde stationnaire
  de la colonne d'air, absorber l'énergie
  interne et émettre un son avec leurs surfaces externes. Si elles résonnent
  à des fréquences
  particulières (par exemple les fréquences harmoniques de la colonne
  d'air) l'effet sera-t-il constructif, nuisible ou insignifiant ? L'examen suivant
des expériences récentes espère apporter une réponse.
  Ando  {7}  rend compte de la façon dont le matériau affecte la
  qualité de son en présentant les résultats de Murakami
  et Kato. La figure l montre les divers endroits où la vibration a été mesurée
  le long d'un pavillon de trombone.

  Fig. 1 Vibrations latérales d'un
  pavillon de trombone (Ando 1971)
  
  
  

Fig. 2 Structure des vibrations transversales à 20 cm du bord
Il s'avère que seule une mesure latérale a été faite
  (le long de la surface supérieure) et elle indique une vibration nulle
  au bord du pavillon, comme s'il était fixé comme point nodal.
  Contrairement à la vue en coupe mesurée à 20 centimètres
  du bord (Fig.2), ceci ne correspond pas aux résultats des autres auteurs.
  Il conclut que le matériau n'a aucun effet important en ce qui concerne
  la structure harmonique, bien qu’il ait relevé un écart
  de 1 dB en le rempaçant par un pavillon plus rigide.
  
  Smith  {3}  a construit un ensemble de six pavillons de trombone semblables
  en laiton en utilisant des matériaux de trois épaisseurs différentes.
  Chacun des pavillons pouvait être adapté alternativement sur un
  corps de trombone qui a été couplé à un excitateur
  acoustique artificiel. Des interferogrammes moyennés dans le temps ont été produits
  pour un grand nombre de résonances du matériau, et des analyses
  complémentaires ont montré une relation mathématique entre
  les amplitudes de vibration des pavillons d'épaisseurs différentes
  {8}. Les résonances les plus fortes ont été trouvées à environ
  240 hertz avec une amplitude considérablement réduite pour les
  pavillons les plus épais (Fig.3). Ces résultats ont été confirmés
  par d'autres techniques (Kitchen, Watkinson et Richardson) en utilisant le
  même ensemble de pavillons.
   
  Fig. 3 Fig. 3 Reconstitution holographique
  des vibrations du pavillon avec excitation de la colonne d'air à environ
  240Hz.
  A gauche : épaisseur de paroi de 0,3mm, à droite : épaisseur
de paroi de 0,4mm (Smith 1978)
 Watkinson {2} a utilisé une méthode d'éléments
  finis pour prévoir les formes de vibration des six pavillons. Bien que
  certaines des données d'entrée soient estimées grossièrement,
  il confirme l’existence d’un mode vibratoire fortement excité à environ
  250 hertz pour le pavillon moyen et un mode plus faible et moins cohérent à une
  fréquence supérieure (500 - 700 hertz). Tandis que Kitchen {9}
  confirme l’existence des modes inférieurs en utilisant une technique
  de velocimétrie à laser Doppler, il trouve une résonance
  plus forte autour de 450 hertz. Comme prévu, les modes des pavillons
  les plus épais ont des fréquences plus élevées
  que ceux des plus minces.
  Un autre test par holographie de Richardson {10} montre que les modes
  structurels par excitation directe sont très proches en fréquences
  de ceux mesurés par d'autres techniques. Quand on les excitait acoustiquement,
  les pavillons minces présentaient un mode structurel (2, 1½)
  proche de la 4ème harmonique de la colonne d'air. En changeant la
  longueur du tube de coulisse la résonance structurelle était
  plus facilement excitée quand le mode de la colonne d'air coïncidait
  en fréquence
  avec cette résonance, mais il n'y a aucune évidence d’un
  couplage fort qui, s’il était constitué, causerait un dédoublement
  de mode.
  
  Propriétés acoustiques des pavillons des cuivres. 
  Connaissant les fréquences des modes structurels, on sait dans quelle
  bande de fréquences le spectre acoustique pourrait être influencé.
  L'utilisation d'un instrumentiste humain comme source des mesures acoustiques
  et vibratoires s’est révélée non satisfaisante en
  raison de la faible reproductibilité des résultats, et par conséquent
  Smith {12} a utilisé la “sirène” développée
  par Wogram {11} pour produire les spectres en régime stabilisé
  pour les six pavillons étudiés. Il a enregistré puis analysé le
  son dans l'axe du pavillon et à l’emplacement de l'oreille de
  l’instrumentiste (par l'intermédiaire d'une tête artificielle).
  Des trois notes enregistrées (Sib1 58 hertz, Sib2 116 hertz et Fa4 349
  hertz), seules deux harmoniques ont été sensiblement affectées
  : 
  a) la 4ème harmonique de Sib1 (c.-à-d. à 232 hertz) et 
  b) la 2ème harmonique de Sib2 (c.-à-d. à 232 hertz) 
  Dans les deux cas, la fréquence de l’harmonique est proche d’une
  résonance structurelle. Ces deux résultats et deux autres sur
des harmoniques non affectées sont présentés sur la figure 4.
![]() a) 4ème harmonique du Sib1  | 
    ![]() b) 2ème harmonique du Sib2  | 
  
![]() c) 5ème harmonique du Sib1  | 
    ![]() d) 1ère harmonique du Sib1  | 
  
  Tests subjectifs des pavillons. 
  La différence de spectre entre l’emplacement de l'oreille et du
  pavillon représente une augmentation d’environ 2 dB pour une harmonique
  particulière pour les pavillons les plus minces. Ayant pris la précaution
  d'égaliser le poids et l'équilibre des pavillons, dix
  des meilleurs trombonistes ont passé un test en double aveugle {13},
  dans lequel les instruments étaient présentés dans un ordre aléatoire (mais
  le même ordre pour tous les musiciens), afin d'établir
  s'ils pouvaient distinguer les six pavillons. Les résultats statistiques
  ont montré que
  la différence entre les pavillons minces et épais était
  si petite qu'elle ne pouvait être détectée par aucun de
  ces instrumentistes.  Par la suite, on a 
  ajouté dans la séquence de test un pavillon en cuivre pur electroformé
  (fait sur un mandrin semblable - mais pas le même).
  Dans les conditions du test il n'apparaissait
  pas sensiblement différent des pavillons en laiton mais une fois
  joué ensuite dans
  des essais non-aveugles, il gagnait des propriétés
  magiques ! 
  Ces résultats montrent que l'épaisseur du pavillon  affecte
  réellement et de façon significative le spectre sonore
  mesuré
  à la position de l'oreille de l'instrumentiste en raison d'un
  certain rayonnement sonore du matériau lui-même.
  Mais dans des conditions  de test rigoureuses les instrumentistes semblent
  incapables de distinguer entre les matériaux épais et mince.
  
    Références : 
  {1} G. G. Fladmoe, Ed.D. Thesis, University of Illinois (1975).
  {2} P. S. Watkinson, Ph.D.Thesis, University of Surrey (1981).
  {3} R. A. Smith, Unpublished Report, Boosey & Havkes Ltd. (1977).
  {4} D. J. Blaikley, Metronome, 35(1) 41-56 (1919).
  {5}  D. J. Blaikley, Workshop Notes (1874).
  {6} J. Backus, The Acoustical Foundations of Music (London: Murray)(1970).
  {7} Y. Ando, The Acoustics of Musical Instruments (en japonais) (1971).
  {8} R. A. Smith, J. Int. Trumpet Guild 3, 27-9 (1978).
  {9} N. Kitchen, Final Year Undergraduate dissertation, I.S.V.R. (1980).
  {10} B. E. Richardson, Unpublished Report, University College, Cardiff (1981).
  {11} K. Wogram, Instrumentenbau 5, 414-418 (1976).
  {12} R. A. Smith, Proceedings of the Institute of Acoustics (4E1)(1981).
  {13} R. L. Pratt and J. M. Bowsher, JSV 57, 425-435 (1978).
Traduit en janvier 2004 par Joël Eymard pour le site web "Tout sur la trompette"